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MATCHMAKERS: CES PROS DE L’AMOUR QUI FONT MIEUX QUE TINDER
Mis à jour le 19 octobre 2018 par Laurence Donis
Blasé de Tinder?
Et si vous alliez voir un matchmaker?
On vous emmène dans les coulisses des agences de chasseurs de coeur, pour les déçus de l’amour 2.0 et les clients exigeants.
Ce ne sont pas des têtes qu’ils chassent, mais des cœurs. On les appelle les «matchmakers». Avant, ils étaient des marieurs, mais le terme old school s’est pimpé pour coller à une réalité : tout le monde ne se satisfait pas des sites de rencontre. C’est là qu’interviennent les agences matrimoniales. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, elles existent toujours en Belgique et les clients sont bien présents. Ils ont entre 25 et 80 ans et un point commun : l’envie d’activer le mode « slow ». « Dans notre société, on veut généralement aller très vite. Ici, on préfère prendre le temps de nouer des relations de qualité », explique Candice van Leer, directrice de l’agence de rencontre Valérie Dax depuis 1970.
Mais comment travaillent les chasseurs de cœurs ? À l’ancienne, sans ordinateur. Marie de Duve, la collaboratrice de Candice, dispose plusieurs classeurs devant elle. À l’intérieur : des fiches individuelles et des photos pour se souvenir de chaque membre. Valérie Dax en compte mille environ. Après un premier contact par téléphone, les clients se rendent à l’agence pour un entretien. Une façon de cerner leurs envies, mais aussi d’effectuer un tri. « Certains viennent avec dix pages de notes sur ce qu’ils recherchent, nous leur disons de rester ouvert », raconte Marie, avant d’ajouter : « Cela nous arrive de refuser des gens. Si le feeling ne passe pas ou qu’ils sont séparés mais toujours mariés, par exemple, c’est non. » Les matchmakers mettent ensuite leurs membres en contact. Deux principes : pas de photo avant la rencontre et c’est toujours l’homme qui appelle la femme pour fixer le premier rendez-vous.
Après un « date », Candice et Marie jouent les coachs, un peu comme des copines expertes en relations amoureuses. Leurs clients leur racontent parfois la soirée (sans oublier les détails coquins), reçoivent des conseils pour la suite et se font même relooker. Walter Benjamin, directeur de l’agence Laura Hamilton, travaille pratiquement de la même manière, à quelques exceptions près. Pour trouver la perle rare, il ne se contente pas de piocher dans sa liste de membres : « J’ai construit un très gros réseau. Je me rends souvent à des dîners, à des soirées privées et lors de ces événements, si je rencontre quelqu’un qui pourrait correspondre à l’un de mes clients, je le “chasse”. Toutes les personnes inscrites chez moi ne sont pas forcément compatibles et cette façon de procéder augmente le taux de réussite. J’utilise aussi le système des ambassadeurs. Il m’arrive de payer des gens qui connaissent beaucoup de monde pour m’aider à trouver la bonne personne. »
Face au succès des sites de rencontre, comment les agences tiennent-elles le coup ? « Honnêtement, c’était dur au début, mais ça a été un mal pour un bien », raconte Walter. « 90 % de nos adhérents ont essayé de trouver l’amour sur internet mais ils ont été déçus et sont arrivés chez nous », ajoute Candice. Certaines agences matrimoniales visent par ailleurs un marché de niche : le haut de gamme. Pour elles, les applis de dating ne sont même pas des concurrentes. C’est le cas de Berkeley International, qui recrute « l’élite, les célibataires financièrement indépendants et couronnés de succès ». « Nos membres n’utilisent pas Tinder pour faire des rencontres, affirme Geneviève Heintz, comanager du bureau belge. Ils ont un certain statut et une vie professionnelle intense, ils n’ont pas envie d’être visibles sur le web et n’ont pas de temps à y consacrer. Ici, nous nous occupons de tout, nous offrons un service beaucoup plus personnalisé. »
« Je ne crois pas aux algorithmes, je fais plutôt confiance aux approches personnelles. Un tri est effectué avec discrétion par des matchmakers expérimentés en fonction des informations dont ils disposent (métier, vécu, centres d’intérêt, etc.). Difficile de faire mieux soi-même. Le nombre de rencontres est limité mais pour moi, c’est plutôt un avantage », raconte Charles, un promoteur immobilier membre de Berkeley. Alors que vous pouvez enchaîner les « dates » sur internet, vous ne rencontrerez généralement pas plus d’une personne par semaine via une agence. Mais ce qui séduit aussi, c’est le sentiment de sécurité apporté par les chasseurs de cœurs. Que celles qui n’ont jamais rencontré un pervers sur Tinder jettent la première pierre.
Ici, le risque n’est pas exclu, mais limité. Les adhérents doivent tous remplir un contrat. « On demande toujours une copie de la carte d’identité et nos membres jurent sur l’honneur qu’ils ne sont pas mariés. Si on découvre qu’ils n’ont pas dit la vérité, on peut les poursuivre », explique la directrice de Valérie Dax. Une preuve de divorce est souvent demandée et les pros vérifient le profil des futurs partenaires sur internet. « Google est la meilleure agence de détectives privés. Avant d’inscrire quelqu’un chez moi, je le cherche sur les réseaux sociaux, Facebook, LinkedIn. J’arrive toujours à trouver des informations fiables », raconte Walter. Depuis 2006, une loi sur le courtage matrimonial est entrée en application chez nous. Les agences doivent utiliser un contrat type et sa durée est limitée, une façon de protéger les clients. Mais les sites de rencontre ne sont pas soumis à cette réglementation et les faux profils fleurissent de plus en plus.
« Je me suis inscrit dans une agence après m’être fait arnaquer sur internet. Je suis tombé amoureux d’une superbe femme qui ne s’intéressait en fait qu’à mon argent », raconte Lionel, 52 ans. Un classique. « L’avantage d’une agence, c’est qu’on est pratiquement certain de rencontrer une personne sérieuse. Si elle préfère avoir une aventure plutôt que de s’engager dans une relation stable, pourquoi dépenser de l’argent ? » ajoute le manager de Laura Hamilton. Oui, payer des centaines d’euros pour un coup d’un soir, ce n’est pas vraiment donné. Mais,au fait, s’inscrire dans une agence, ça coûte combien ? C’est là que ça coince. Chez Valérie Dax, les formules varient entre 885 et 1 497 euros. Laura Hamilton demande à ses membres entre 2 000 et 4 000 euros pour un an. Ici, tout dépend de l’âge et des requêtes. Tous nous l’ont confirmé : c’est cruel, mais c’est la loi du marché. Après 50 ans, les femmes ont moins de chance de trouver l’amour.
Berkeley International reste l’une des agences les plus chères. Pour coller à son image de luxe et faire une sélection, le bureau belge fixe sa cotisation annuelle à 2 000 euros. Il faudra encore dépenser 6 000 euros pour être membre. Et si vous comptez rechercher l’âme sœur dans le monde entier, les sommes deviennent astronomiques. Un petit investissement de 25 000 euros vous sera réclamé (10 000 euros de cotisation annuelle et 15 000 euros pour être membre). À ce prix-là, on aimerait bien que Cupidon décoche ses flèches illico presto, mais il faut parfois être patient. « Nous n’avons pas de boule de cristal, c’est impossible de savoir combien de temps ça prendra, explique Candice van Leer. Cela dépend des personnes, mais nous nous contentons parfois de donner un petit coup de pouce. Un homme membre chez nous depuis un an et demi s’est mis en couple avec une femme qui venait de s’inscrire. Ils ne s’étaient jamais rencontrés et pourtant ils travaillaient dans la même rue, faisaient leurs courses dans le même magasin. Aujourd’hui, elle est enceinte de leur deuxième enfant. »
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